Xavier Vanpoucke, un entrepreneur agricole inspiré aux Terres de la Cala !

Avec Valéry Blésin et Benoît Linard, Xavier Vanpoucke a créé la coopérative agricole Terres de la Cala à Glabais. Une autre façon de faire de l’agriculture, propre, humaine, bienveillante pour les hommes comme pour la Terre.  Une manière de se reconnecter à la nature et de s’engager dans la préservation de notre environnement et de la biodiversité.

Un parcours étonnant

Originaire de Waterloo, Xavier Vanpoucke est ingénieur commercial. Il a commencé sa carrière dans le trading de marché de gros de l’électricité pour Electrabel. Il a ensuite passé 10 ans à Londres (entrecoupé d’un voyage « sac à dos » de 9 mois) toujours dans le trading. Il n’était donc pas du tout dans la transition.

En 2007, il achète un terrain constructible avec un terrain agricole attenant à Glabais, sans savoir que faire de ces 4 hectares au départ. Il commence par y planter des arbres et des haies pour améliorer la biodiversité du site. A 40 ans, il démissionne souhaitant s’engager dans une activité qui a du sens au niveau social et environnemental. Il prend une année sabbatique en 2015 pour s’occuper de ses enfants.

Avec Valery Blésin et Benoît Linard, deux amis de longue date, ils avaient envie de s’engager dans quelque chose de différent. Un très grand ami à eux, Patrick Baele, installé au Maroc et passionné par la permaculture a semé la graine dans leurs têtes. S’en suivirent multitudes d’échanges, de rencontres et de réunions passionnées entre les 4 amis. On est alors au moment de la COP21. A l’époque, on parlait de plus en plus d’agroécologie et de permaculture dans le contexte du retour à la terre.

Début 2016, Ils s’inscrivent à une formation de maraichage d’une semaine à la ferme du Bec Hellouin, très beau lieu dédié à la permaculture (cette exploitation agricole située en Normandie applique ce que Charles et Périnne Hervé-Gruyer appellent « écoculture » depuis 2007 faisant de cette ferme un modèle, une source d’inspiration et de formation).

Suite à ce stage, ils se lancent durant l’été avec un coach, formateur en maraichage façon permaculture. Ils produisent leurs premiers paniers de légumes à toute petite échelle. Emballés par cette première expérience, ils décident alors de créer la coopérative appelée Ferme Bio de Glabais. Celle-ci voit le jour en septembre 2016.

Les Terres de la Cala : un lieu magnifique en constante évolution

En 2017, nos 3 amis achètent les deux premières serres-tunnels et démarrent les premières ventes officielles de paniers de légumes. Cela reste tout petit mais l’impact est déjà positif pour la biodiversité. Ils demandent et obtiennent (difficilement) un permis d’urbanisme pour créer un chemin d’accès, placer les containeurs et construire deux grandes serres (une seule sera finalement construite).

Ils continuent à se former, utilisant les nouvelles ressources disponibles en ligne notamment avec Jean-Martin Fortier et Richard Perkins qui les sensibilise à l’importance de se diversifier. Ne faire que du maraîchage sera difficile à rentabiliser, il faut multiplier les types de production. C’est pourquoi ils créent deux grandes zones : le maraîchage dans le haut, et des poulaillers agro-forestiers couplés à un verger et des haies fruitières diversifiées dans le bas.

La formule des paniers de légumes n’est pas suffisante pour en vivre. Ils essaient alors de travailler avec un petit étal. Mais la localisation du site, éloigné et peu visible, l’empêche de bien fonctionner.

En 2020, ils plantent 4.000 arbres et des centaines de plantes aromatiques. Les haies créées sont d’excellents brise-vents, et aident à la biodiversité en créant des abris pour la microfaune et de la nourriture pour les oiseaux. Ils installent aussi des mares pour avoir des réserves d’eau sans devoir systématiquement pomper dans la nappe phréatique. L’impact environnemental est évidemment très positif ! La grande serre est construite cette année-là aussi. Et une première petite expérience d’élevage de poulets commence avec un bon retour des clients. On sent chez Xavier une volonté passionnée de restaurer, protéger ses terres mais aussi de créer encore et encore de la biodiversité.

Actuellement, le modèle des Terres de la Cala n’est pas assez rentable. C’est pourquoi en 2021 ils proposent des abonnements à la saison. L’idée est de lier davantage les producteurs et les consommateurs (Community Supported Agriculture). Cette année-là, ils plantent encore 300 arbres fruitiers de 15 espèces (pommes, poires, prunes, cerises, nashis, kakis, abricots, pêches, figues,…) et des centaines de petits fruitiers (framboises, mûres, groseilles,…) dans le but d’encore diversifier la production. Ils obtiennent l’agrément de l’AFSCA pour augmenter la commercialisation des poulets.

Tout cela prend beaucoup de temps et ils doivent engager de la main d’œuvre. Ils ont deux CDD, Nathan et Aude, pour le maraîchage. Xavier travaille lui bénévolement depuis le début. Ils cherchent encore quelqu’un pour s’occuper des poulets. Ils ont aussi la chance d’avoir régulièrement des stagiaires pour les aider.

Grâce à un partenariat avec le restaurant Les Filles qui absorbait les grosses productions, 2021 a été la seule année en break even (hors investissement).

De beaux résultats à encourager et soutenir

Grâce à toutes ces réalisations, les Terres de la Cala sont aujourd’hui un territoire riche en biodiversité qui produit des légumes, des fruits, et des poulets, bios, locaux et de qualité. Les poulets sont des coucous de Malines, espèce rustique belge à croissance lente de qualité supérieure qui doit être nourrie 15 à 20 jours de plus que l’autre espèce bio belge que l’on retrouve généralement dans les magasins (coût supplémentaire de 1 à 1,5 €/kg ce qui est compliqué dans le contexte de crise économique actuel).

Le maraichage occupe une surface nette d’environ 30 ares.

La matière organique dans la terre est passée de 3 à 7%. Or, un seul pourcent de matière organique supplémentaire permet à la terre de pouvoir absorber 15 à 20 ml d’eau en plus par m². Comme la matière organique est composée à 58% de carbone, l’augmentation de la fertilité des sols est essentielle pour lutter contre le dérèglement climatique et à ses conséquences :  ça permet de retenir l’eau dans les sols pour la rendre disponible quand il fait sec et cela prévient l’érosion de ceux-ci qui emporte l’épiderme fertile de la terre et par conséquent, les coulées de boues et les dégâts des eaux en découlant.

La difficulté de la commercialisation : perspectives et interventions communales

Le projet est difficile à rentabiliser surtout par la complexité de commercialiser la production. Le bio est fortement impacté par la crise économique et il y a énormément de magasins bios aujourd’hui. Le principal point faible des Terres de la Cala est leur situation au milieu d’une zone de population très peu dense avec un accès difficile et peu visible. Glabais est trop de loin de Bruxelles ou Charleroi pour faire partie de la ceinture alimentaire de ces villes. A Genappe, il est vrai, on bénéficie d’une offre beaucoup plus grande (et très variée) que la demande…

L’équipe des Terres de la Cala a aujourd’hui une offre diversifiée en légumes et fruits, offre qui va encore grandir avec la maturité des arbres fruitiers. Ils espèrent aussi que la vente des coucous de Malines leur permettra d’améliorer la rentabilité de l’activité.

Dans le cadre du soutien aux producteurs locaux et à la préservation de l’environnement, rappelons ici que les autorités communales avaient en 2018 pour objectif stratégique la promotion de nouvelles filières comme le maraichage bio, les petits élevages ou encore l’agroforesterie.

Xavier pense que la commune pourrait en effet aider les petits producteurs de différentes manières.

  • La commune pourrait créer une halle où ceux-ci pourraient venir vendre leur production. Avec un système de tournante pour éviter que cela prenne trop de temps aux producteurs. Mais il reconnait que beaucoup d’agriculteurs préfèrent rester dans leurs fermes plutôt que participer à ces initiatives collectives qui n’ont pas de sens pour tous (beaucoup ont aujourd’hui leur magasin sur leur lieu de production).
  • Une autre aide serait de développer des filières communales de transformation des produits (les confitures de Genappe par exemple). Un exemple existe à Rhisnes avec la Fabrique Circuit Courts. Ca nous semble une piste intéressante à analyser via le GAL du Pays des 4 Bras par exemple.
  • La commune pourrait mettre en place un service citoyen qui permettrait une aide concrète sur le terrain (désherbage entre autres).
  • Enfin, le projet de Genappe de créer sa propre cuisine collective aurait tout son sens pour dynamiser les circuits courts, soutenir les producteurs et offrir une alimentation saine aux collectivités (écoles primaires et secondaire, CPAS, Centre Croix-Rouge, crèches). Une étude de faisabilité devrait être envisagée au plus vite.

Notons qu’en perpétuelle réflexion pour améliorer sa situation et rendre durable son modèle, la coopérative ne manque jamais de ressources et propose dès cette année une nouvelle formule : l’auto-cueillette. Cette formule réduit la charge de travail et devrait permettre de générer un salaire horaire plus raisonnable (on est à 6-8 € de l’heure seulement aujourd’hui). Et le coût sera nettement moins cher que dans les magasins puisqu’il n’y a aucun intermédiaire et que le consommacteur prend se charge de la récolte. Tout bénéfice pour le producteur et le consommateur donc.

Il faut atteindre des abonnements de 200 personnes (ou 80 familles) pour que cela fonctionne. Xavier dit : « Ça passe ou ça casse ». Espérons que ça passe !

Pour cela, soulignons aussi la nécessité d’un travail continu de sensibilisation de la population aux enjeux de santé et d’indispensable transition pour rendre notre commune la plus autonome possible. Le soutien aux producteurs passe aussi par une information constante que ce soit via le Journal de la Ville, les activités du service environnement, l’organisation de conférences de la commission agriculture, la visite de ces lieux,… Il s’agit de responsabiliser les consommateurs et l’ensemble des acteurs. «  On peut améliorer sans cesse notre process… mais il faut que la demande  suive» conclut Xavier.

Nous recommandons à tous nos lecteurs d’adhérer à cette formule d’autocueillette. Une manière de bénéficier d’une production bio, locale et de qualité pour un prix correct !

 

Anne Beghin et Bernard Löwenthal