2 septembre 2023

Agriculture : l’engagement de chacun.e est incontournable

Le politique est un des acteurs du soutien de l’agriculture familiale, des nouvelles filières, du maraichage, de la relocalisation. Et ce dès le niveau communal.

A Genappe, le politique reste encore trop en retrait. Il ne suffit pas d’organiser annuellement un ou deux marchés des producteurs locaux, de participer à des événements tels « Au cœur de nos campagnes » ou encore de financer une étude. Il faut aller –beaucoup- plus loin et agir: concrétiser, opérationnaliser. Bref il faut vouloir et permettre les changements face aux nombreux défis actuels qui concernent ce secteur comme la perte de biodiversité, le changement climatique, la dépendance à une météo de plus en plus imprévisible, la nécessité de s’adapter aux canicules et inondations, la diminution du nombre d’agriculteurs, leur stress, leur épuisement, leurs charges administratives ou encore leurs faibles revenus. Participer au nécessaire rapprochement des producteurs et des citoyens demande, au-delà des promesses, un véritable engagement. Un de nos défis est de reprendre en main notre alimentation. Pour cela les autorités de Genappe doivent faire preuve de conviction que 60% des transitions s’opèrent dès le niveau communal. Et alors développer des stratégies et prévoir des budgets. Rapidement.

Une étude et après ?

Si je peux féliciter le travail réalisé dans le cadre de cette récente enquête confiée à une société indépendante par le collège et la commission agriculture auprès d’une vingtaine d’agriculteurs du territoire de Genappe, je peux aussi en tant que membre de la commission agriculture témoigner du fait qu’ils se sont sentis activement écoutés lors des entretiens individuels anonymes et des ateliers de parole. Cette écoute leur a permis de se distancer des critiques nombreuses à leur égard et du découragement régulier qu’ils connaissent. Cette étude a le mérite d’illustrer et de confirmer toute une série de choses connues parfois de longue date.

Ainsi, elle met en évidence différents éléments qui sont les leviers pour des actions concrètes

  • L’étude souligne que le modèle actuel favorise les grosses exploitations hypermécanisées en monocultures et que beaucoup d’agriculteurs de Genappe veulent s’en éloigner.
  • Elle souligne le grand écart entre la spécialisation de certains et la diversification d’autres
  • Elle dit leur isolement, leur épuisement face aux charges administratives et le refus grandissant de certains de dépendre de primes. L’étude met alors en évidence leur souhait d’autonomie pour une meilleure maitrise de leurs productions et une meilleure qualité de vie.
  • Elle souligne le besoin de communication, d’information et de sensibilisation.
  • Elle dit enfin tant les freins à la relocalisation que les souhaits de développer les circuits courts et la vente en direct.

La commune levier du changement !

Rappelons alors que les communes peuvent être un soutien actif dans le cadre de la transition agricole. En effet elles peuvent être à la manœuvre pour

  • Permettre la mise en place d’un service agricole,
  • Faciliter la mise en place d’une halle des producteurs locaux,
  • Créer et financer une cuisine collective,
  • Permettre l’accès à la terre,
  • Développer plateformes et réseaux de solidarité, coopération et mutualisation de certains outils et machines,
  • Apporter un soutien aux maraichers de plus en plus en plus nombreux,
  • Communiquer sur la formation ou le renouvellement de la formation agricole de certains,
  • Favoriser la diversification à travers une série d’actions.

Ce dernier point est d’ailleurs repris tel quel en page163 du Programme Stratégique Transversal du Collège communal et est repris en priorité 1 de l’actuelle législature. Si le diagnostic posé par cette étude est essentiel…Notre groupe regrette fortement qu’elle se soit déroulée si tardivement dans la législature. Les promesses du PST resteront-elles alors en l’état ? Quelles sont les étapes suivantes pour le maintien et le soutien des fermes familiales, des maraicher.e.s et de tous ceux.celles qui souhaitent s’engager dans la transition ? Qui sont ceux et celles qui sont déjà en reconversion sur notre territoire communal ou qui souhaiteraient s’y engager ? Comment les connaître, les identifier ? Comment aider, former, soutenir chacun.e dès le niveau communal ?

Le collège doit se retrousser les manches !

Il est primordial aussi d’aller bien au-delà de ce que nous avons pu lire comme conclusion du collège dans le dossier du conseil communal d’août 2023 « L’objectif est que cette enquête puisse servir la commission agricole et la ville dans leur travail sur le lien entre agriculture et citoyens ». La transition environnementale et agricole va bien au-delà de ce travail. Pour notre groupe la relocalisation et la transition vers une agriculture durable, de proximité et bio sont un enjeu majeur sur notre commune particulièrement rurale et peu dense. Riche aussi de quelque 60 exploitations agricoles et d’une dizaine de maraichages.

En ce sens soulignons que les auteurs de l’étude eux-mêmes nous rejoignent dans leurs conclusions et recommandations : « Nous n’avons pas approfondi ici l’opérationnalisation de certaines pistes d’action qui, permettent d’avancer sur les recommandations, ce qui implique d’identifier les porteurs de projets et des expertises techniques d’étude des dossiers. Nous espérons que ceci fera l’objet d’initiatives ultérieures qui peuvent s’appuyer sur ce diagnostic partagé. (P. 22 et 23) ». Nous aussi nous espérons ces initiatives. Nous ne devons pas attendre la législature prochaine pour travailler activement et de manière constructive. Il va falloir urgemment penser, opérationnaliser, chiffrer les pistes de changements et les objectifs. Genappe à la potentialité de se libérer du moins en partie de l’agro-business et de s’affirmer dans les 10 ans à venir en tant que commune autonome sur le plan alimentaire. Certains citoyens, certaines associations et coopératives sur notre commune y travaillent déjà. Certains maraichers et agriculteurs aussi. D’autres souhaitent aujourd’hui rejoindre ce mouvement. Il est grand temps que nos autorités aussi se retroussent les manches et participent à cette mobilisation si l’on veut vraiment redonner du sens aux différents métiers de la terre et à notre alimentation. Retrouver le lien perdu entre terre et assiette. Notre groupe politique se veut depuis longtemps le porte-parole de ce défi et considère les agriculteurs et maraichers comme les acteurs incontournables, expérimentés, volontaires qui le relèveront mais certainement pas seuls. Les autorités mais aussi les citoyens -ou plus simplement les mangeurs- doivent prendre conscience des enjeux alimentaires qui s’imposent à nous toutes et tous.

Nous n’avons pas le choix, il faut organiser le changement vers notre autonomie alimentaire

Si la relocalisation oblige de s’affranchir des marchés mondiaux, exportateurs et hyper productivistes…retenons qu’elle a un impact fondamental, positif sur de nombreuses réalités (climat, biodiversité, alimentation, santé). Retenons enfin qu’elle concerne tout le monde (agriculteurs, consommateurs et politiques). A Genappe cette mobilisation collective souffre d’autorités communales à la traine. Il est temps que celles-ci se sentent profondément concernées. Et s’engagent pour que notre commune devienne plus autonome et libre.

 

Anne Beghin
Conseillère communale et Co-présidente Ecolo Genappe