François Dekeuleneer, un entrepreneur engagé pour l’environnement !

En ce début juin pluvieux, nous sommes accueillis par François Dekeuleneer, le directeur d’Indrani Lodge qui travaille depuis 16 ans pour la famille Brawemann, les propriétaires du site.

François a été amené à s’occuper du jardin et de la maison un peu par hasard pendant que les propriétaires étaient à l’étranger (ils voyageaient beaucoup pour leur travail). Il a ensuite développé les chambres d’hôtes, puis l’hôtel, … et en est devenu le directeur.

Photo : François Dekeuleneer et Catherine Olbrechts

L’histoire d’Indrani Lodge

Le point de départ de l’entreprise est l’achat de la ferme en 1994 par Philippe et Jessica Brawemann pour en faire leur maison privée. Dès ce moment, plus aucun produit phyto n’a été épandu sur leurs terres, 5 hectares de prairies, jardins et potagers qui sont donc passés en bio. Leurs décisions ont toujours été très éthiques.

En 2016, ils ouvrent les premières chambres d’hôtes et un petit studio de yoga. C’est leur premier investissement écologique important. Ils installent un système de géothermie horizontale avec pompe à chaleur alimentée par 160 panneaux photovoltaïques. A cela s’ajoute une capacité de stockage avec des batteries de 30 kWh.

Depuis lors, la moitié des panneaux ont été remplacés par des modèles de nouvelle génération qui produisent de l’électricité grâce à la luminosité (pas besoin de soleil).

Le yoga a pris de l’ampleur et du succès. D’autres activités complètent l’offre : céramique, naturopathie, cours de cuisine, jardinage, … 10 professeur.es s’occupent des 1200 abonnés !

En 2017, la famille Sneessens leur propose d’acheter leur ferme, ce qu’ils font. Ils y installent des chambres supplémentaires ce qui les oblige à prévoir du catering. En effet, la législation dit qu’au-delà de 6 chambres, l’établissement devient un hôtel ce qui entraine l’obligation de proposer de la restauration. Comme ils avaient déjà le maraichage à titre privé, c’était une évidence d’ouvrir un restaurant à 90% végétal. Celui-ci s’ouvre le 22 juin 2022.

L’impact des travaux

Indrani Lodge est actuellement fortement impacté par les travaux de voirie et de la place devant l’église. Le retard s’élève déjà à 16 semaines. Il est difficile de marcher dans la rue entre les deux fermes. L’aspect général en travaux n’est pas engageant bien que l’accès en voiture reste possible. Ils espèrent la fin des travaux d’ici la fin juin.

Résultat : une diminution de la fréquentation de 45% pour le yoga et de 35% pour le restaurant ! Et aucune aide ou compensation n’est proposée (entre autres parce que leur entreprise ne cadre avec aucune des catégories habituelles). Les travaux ont été commandés par la commune qui bénéficie de subsides de la Région wallonne.

La ministre régionale Valérie Debue est allée sur place mais sans résultat. Le service du patrimoine de la Région Wallonne est très strict par rapport aux aspects extérieur et l’intégration de nouvelle technique ; il refuse par exemple d’utiliser des tuiles solaires. Le SPW, le CGT et l’Agence Wallonne du Patrimoine sont débordés et donc tout avance très lentement.

Un hôtel exemplaire

L’hôtel a obtenu le label de la Clé Verte, un label européen récompensant leurs efforts au niveau environnemental : énergie, déchet, gestion rationnelle de l’eau et récupération des eaux de pluies, …. Malheureusement, ce label n’a pas la même notoriété que les étoiles classiques. Le CGT (commissariat général au tourisme) ne leur a octroyé que 2 étoiles supérieures, ce qui est regrettable vu leurs installations et la beauté du lieu. Ils sont en réalité sanctionnés par leurs choix écologiques : pas de mini-bar dans chaque chambre (économie d’énergie de l’équivalent d’une habitation), matelas en matière 100% recyclées mais d’une épaisseur de 26 cm alors qu’il en faut 28 pour les critères des étoiles, pas de réceptionniste 24h/24 parce que pas nécessaire, pas d’ascenseur, …

L’exemplarité peut également être soulignée dans le management de l’équipe qui est organisé de façon très « horizontal ». Chacun peut faire une proposition lors des réunions hebdomadaires ou toutes l’équipe est rassemblée. Les nouvelles initiatives ou suggestions sont planifiées. Ensuite les nouveaux projets ou procédures sont évaluées en équipes. « A Indrani Lodge, une femme de ménage a certainement des idées aux quelles on ne pense pas » nous dit François.

Un projet inspirant aussi bien pour son management qu’au niveau des choix écologiques réalisés.

La piscine de l’hôtel est installée dans l’ancienne grange. Elle est uniquement accessible pour les clients de l’hôtel.

Un restaurant de produits locaux

Le restaurant fonctionne à 90% avec des végétaux issus de leur production ou d’agriculteurs de la région. Ils disposent de 1,2 hectares de maraîchage.

Ils cuisinent 36 couverts, à raison de 4 soirs par semaine, plus des lunchs les jeudi et vendredi. Le menu 4 services est à 62 € par exemple. Ils font le maximum eux-mêmes ; yaourts, confitures, pains, conserves de légumes, …

Ils visent le zéro-déchets en cuisine pour éviter le gaspillage alimentaire courant dans l’Horeca. Pour atteindre cet objectif, ils ont créé une cantine de quartier à midi proposant du mercredi au samedi des préparations simples et à prix démocratique ; quiches & soupes…. Ils espèrent qu’après les travaux, cette cantine fonctionnera mieux. Une terrasse pour le restaurant devant la ferme est actuellement en demande d’autorisation à la commune.

Un exemple énergétique

Indrani Lodge est exemplaire au niveau consommation et production d’énergie. Tout est réfléchi à l’économie. Les isolations sont très performantes. Ils estiment avoir un PEB A même s’il n’est pas possible de le mesurer selon les critères officiels. C’est évidemment un exploit dans de vieux bâtiments classés.

L’isolation est faite en chaux chanvre. Le chauffage par le sol est un système innovant (Opal système) évitant de devoir le couvrir de béton et permettant de chauffer plus rapidement. L’éclairage est aussi très économe.

La pompe à chaleur, prévue au départ, a été remplacée par une très grosse chaudière biomasse car elle était particulièrement énergivore. Elle ne sert plus qu’en back-up.

La chaudière fonctionne avec des plaquettes de bois fournit par COPEOS qui le produit localement (dans un rayon de 15 km). Ils ont une capacité impressionnante de l’équivalent de 32 habitations. Indrani Lodge n’en utilise qu’une petite moitié. Ils proposent donc à leurs voisins de s’unir, via leur nouvelle coopérative, pour consommer cette chaleur produite par la biomasse. Il est également possible d’échanger entre voisin l’électricité produite par les panneaux photovoltaïques.

Les voisins directs adhèrent pour la plupart à la coopérative étant donné le gain financier. Il n’y a pas de bénéfice, ce n’est pas son objectif. Chaque raccordement énergétique bénéficie d’une voix dans la coopérative. Cela s’étend rapidement. L’école du Petit Chemin située à proximité de la ferme va aussi y adhérer.

Toutes les techniques spéciales sont informatisées pour permettre une gestion centralisée. Les vannes sont électriques par exemple, ce qui permet de savoir directement où il y a un problème.

Ils n’ont bénéficié d’aucun subside pour mettre cette installation en place. Ils ont uniquement obtenu 7.000 € de la commune dans le cadre d’un budget participatif pour mettre en place le montage juridique de la coopérative. Ce montage juridique est disponible en ligne et peut donc être réutilisé par d’autres qui voudraient se lancer dans des projets similaires.

Grâce à leur production, tout l’Indrani Lodge roule gratuitement en voiture électriques. Ils envisagent l’achat d’une voiture partagée pour mettre à disposition ce qui permettrait peut-être de diminuer le nombre de voitures dans le quartier.

Ils ont aussi la chance d’être à proximité du ravel, accessible par les bi-bandes cyclables. C’est d’ailleurs un atout à exploiter pour attirer de la clientèle. De nombreux néerlandophones y viennent à vélo depuis la Flandre.

Un gros employeur pour notre commune

Indrani Lodge occupe 27 salariés ce qui en fait l’un des plus gros employeurs de Genappe. Ils recherchent surtout des personnes courageuses qui veulent travailler plutôt que des gens qualifiés.

C’est une chance pour une commune comme la nôtre d’avoir une entreprise qui respecte l’environnement et qui fournit du travail à autant de personnes !

Une notoriété à l’étranger mais pas à Genappe

Curieusement, Indrani Lodge est plus connu à l’étranger que localement. Des gens du monde entier y viennent, très peu de Genappe.

La commune pourrait les aider à ce niveau, ne fut-ce qu’en communiquant dans le Journal de Genappe. Ça pourrait être une aide dans le cadre des nuisances engendrées par les travaux par exemple.

En dehors de cela, François Dekeuleneer ne croit pas que la politique peur les aider. Les grosses décisions se prennent à l’Europe où beaucoup de parti envoient des politiciens en fin de carrière qui ne feront pas grand-chose. Pour lui, les politiciens ne devraient pas être des professionnels. Nous le rejoignons bien sûr, c’est d’ailleurs la raison de la limitation à deux mandats chez Ecolo.

 

Bernard Löwenthal et Catherine Olbrechts